Dossier

Analyse de la théorie de la microkinésithérapie

Petites fleurs blanches et violettes

Faisons maintenant usage de notre esprit critique pour analyser chaque théorie ou principe utilisé en microkinésithérapie.

Gardez à l’esprit que nous ne parlons ici que de théorie. La présentation et l’analyse de la pratique se fera dans l’article suivant.

Embryologie

L’embryologie est une discipline scientifique universellement reconnue. Depuis les années 90, elle est plus couramment désignée comme « biologie du développement ». Pas grand chose à redire.

Il est louable que les fondateurs de la microkinésithérapie se soient penchés sur son étude pour essayer de trouver des explications à leur nouvelle thérapie. Rares sont les fondateurs de nouvelles thérapies alternatives qui prennent la peine de se servir d’au moins une discipline scientifique valide.

Comment est utilisée l’embryologie pour expliquer la microkinésithérapie ?

  • En combinaison avec l’ostéopathie cranio-sacrée, à former l’hypothèse que chaque tissu primordial à un rythme vital propre.
  • Aider à la création d’une carte du corps pour les protocole de recherche des étiologies (projection sur les zones dermiques)
  • Aider à la création de la carte des étages corporels

Nous ferons l’analyse critique de ces points en détails plus loin.

Ici, nous pouvons simplement remarquer que les fondateurs semblent sauter de « il y a 3 tissus primaires dans l’embryon humain », ce qui est tout à fait reconnu, à tout un tas de choses qui sont le fruit de leur intuition/imagination, sans vraiment d’explications. Il n’y a pas de logique continue qui permettrait de dire que leur théorie est vraiment basée sur l’embryologie. Il serait plus correct de dire qu’ils se sont inspirés de quelques connaissances issues de l’embryogenèse.

A noter un autre aspect qui me semble bizarre : le fait qu’ils parlent de tissus mésoderme/endoderme/ectoderme comme de tissus que l’on retrouve distinctement dans le corps, alors qu’il me semble que cela n’a pas de sens en dehors de l’embryon. Un fois l’humain pleinement développé, il me semble que, si l’on parle de tissus, l’on devrait parler de tissus biologiques épithélial/conjonctif/musculaire/nerveux. Ce faisant, cela compliquerait la théorie des rythmes vitaux des tissus qu’ils prétendent ressentir : par exemple, comment mesurer la fréquences des battement de l’endoderme, alors qu’aucun tissu biologique ne dérive directement que de lui ?

Phylogénie (ou phylogenèse)

La phylogenèse est une science qui recherche des liens de parentés génétiques entre des organismes vivants. Plus je lis de choses dans ce domaine, plus je me rends compte que c’est quand même velu comme discipline… et on voit mal l’utilisation qu’en fait la microkinésithérapie au delà de se servir d’un mot compliqué pour parler du principe de « l’évolution des espèces ».

Dans sa présentation, alors qu’il ne se prive pas d’utiliser moult termes venus de l’embryologie, Grosjean n’utilise pas le vocabulaire de la phylogenèse. Il se contente de parler de vertébré et d’invertébré, comme si le premier était une évolution du deuxième…

Permettez moi une comparaison un peu moqueuse, pour illustrer la différence de profondeur entre la discipline et l’utilisation qu’en fait Grosjean :

Arbre phylogénétique
Arbre phylogénétique moderne (source)
Présentation du vivant par Grosjean, pour la microkinésithérapie.
Présentation de Grosjean

Théorie de la récapitulation

Cette théorie a effectivement existée en ontogenèse, et avait nombre d’adhérents… il y a environ un siècle. Elle n’a cependant jamais été complètement acceptée, les biologistes lui préférant le principe de divergence de Von Baer. Au mieux, on peut accepter que « un vertébré présente, lors de son développement embryonnaire, des stades ressemblant aux stades embryonnaires de ses ancêtres », ou bien qu’un phénomène rare de « récapitulation » peut se produire chez certaines espèces si l’on ne considère qu’un seul caractère…

Cette théorie est de nos jours invalidée et définitivement rejetée par le consensus scientifique, au profit de théories plus complexes collant mieux avec les connaissances et observations modernes dans ce domaine. (sources) (histoire)

Malheureusement pour Grosjean, le point le plus particulièrement invalidé de cette théorie, celui qu’un organisme adulte conserve les caractéristiques de chaque étape évolutive de ses ancêtres phylogénétiques, est celui qu’il utilise pour expliquer la carte de « zones épidermiques ».

Chaque organisme conserve les systèmes neurologiques de chaque stade d’évolution.

Article de Grosjean dans le magazine HEGEL vol.7 n°2 (2017), page 137

Ceci est faux.

Ostéopathie

Nous sortons maintenant du domaine scientifique. Il s’agit vraiment d’un gros morceau, surtout en France, le pays ayant le plus d’ostéopathes par habitant, et de formations en ostéopathie, au monde. Il s’agit de la « médecine complémentaire » la plus populaire en France, à tel point que la valeur limite de saturation du marché est quasiment atteinte en 2018. (source)

Faire une analyse critique de l’ostéopathie serait bien trop long et mériterait largement un site internet entier rien que pour ça. Ca tombe bien, il en existe justement un, écrit par un chirurgien orthopédiste pédiatre, qui est très, très complet. Je vous recommande vivement d’aller le consulter.

Cependant, comme Grosjean s’inspire plus directement d’une branche particulière de l’ostéopathie, la « cranio-sacrée », nous pouvons nous pencher sur celle-ci :

  • Le Conseil National de l’Ordre des Masseurs Kinésithérapeute (CNOMK) a publié en 2016 un avis dont les dernières lignes sont « En conclusion l’ostéopathie crânienne n’est pas un soin conforme aux données scientifiques et sa pratique par un kinésithérapeute constitue une dérive thérapeutique. » (source) Dès lors, si un kinésithérapeute pratique un soin cranio-sacré sur un patient, il viole le code de déontologie.
  • Un des rapports français le plus détaillé à ce jour, publié en 2015 par le Collectif de Recherche Transdisciplinaire Esprit Critique & Sciences (CORTECS), conclut avec « les thérapies du champ de l’ostéopathie crânienne sont à ce jour dépourvues de fondement scientifique (…) rien n’encourage aujourd’hui à la mise en place de ces thérapies dans le cadre d’une prise en charge raisonnée de patients » (lien)
  • Un rapport canadien du British Columbia Office of Health Technology Assessment : « Compte-rendu méthodique et évaluation critique des preuves scientifiques sur la thérapie cranio-sacrée », publié en 1999, conclut avec « il n’existe pas suffisamment de preuves scientifiques pour recommander la thérapie crânio-sacrée à des patients, des praticiens ou à des tiers pour toute condition clinique. (…) L’influence du rythme crânio-sacré sur la santé ou la maladie est totalement inconnue. » (lien)
  • L’article Wikipédia consacré à cette pratique, plutôt bien sourcé, la décrit comme étant du charlatanisme, et potentiellement dangereuse (lien).

Bref, vous l’aurez compris à la vue de ces rapports aussi complets qu’accablants, l’ostéopathie cranio-sacrée n’est pas une base des plus glorieuses sur laquelle fonder une théorie.

Principe de similitude de l’homéopathie

Bien que très largement réfutés par de nombreuses études dans le monde entier, un certain de nombre de personnes croient encore aux principes de l’homéopathie. En France, l’homéopathie reste la forme de médecine alternative la plus populaire (source).

Pourtant :

  • L’homéopathie ne constitue pas un traitement plausible
  • Les études cliniques à grande échelle ont montré que l’homéopathie ne présente aucune efficacité supérieure à l’effet placebo

(voir sources listées sur cette page)

L’homéopathie étant considérée comme une absurdité et du charlatanisme en science et en médecine, l’utilisation d’un de ses principes fondamentaux pour fonder une nouvelle théorie n’apparait pas comme des plus judicieuses.

Rythmes vitaux des tissus

Cette hypothèse, qui semble être à la base de tout, n’a jamais été vérifiée, ni expliquée. Aucune preuve n’a jamais été apportée.

Grosjean et Benini déclarent simplement qu’ils l’ont observé. Plusieurs décennies plus tard, cette seule justification est tout à fait insuffisante.

En dépit du fait d’être présenté comme un point de départ de la théorie, il n’est pas clair en quoi cette dernière utilise effectivement les rythmes vitaux des tissus, au delà peut-être de « si on sent un rythme, ça va, sinon, lésion ».

Questions

  • Pourquoi parler de tissus en désignant les feuillets embryonnaires méso/ecto/endodermes, pourquoi ne pas parler directement des tissus réellement présents dans le corps (épithélial/conjonctif/musculaire/nerveux) ?
  • Le tissu épithélial se forme à partir des 3 feuillets en même temps, quel est son rythme vital ?
  • Où que je pose une main sur le corps, je vais me trouver au dessus d’un grand nombre de tissus différents dérivant de tous les feuillets, comment les discerner ? Si leur seule caractéristique est le rythme, cela semble impossible.
  • A quoi ces battements servent-ils, et a quoi seraient-ils dus ?
  • Qu’apporte l’existence de ces battement à la microkinésithérapie ?

Etages corporels

Il s’agit ici vraiment de la partie à l’apparence la plus « scientifique » de la microkinésithérapie, celle qui fait le plus appel à l’embryogenèse. Malheureusement, les rares explications que l’on peut trouver ici et ne sont pas assez étayées pour pouvoir en faire quoi que ce soit. On peut cependant noter la présence de principes pseudo-scientifiques dans les deux documents sources, ce qui est regrettable.

Au final, la carte des étages corporels reste largement inexpliquée.

Zones épidermiques

Deuxième, et dernier, point d’apparence un minimum « scientifique », après les étages corporels.

Ici les fondateurs se servent un peu de l’embryogenèse, un peu de la phylogenèse, et beaucoup de la loi de récapitulation, pour expliquer leur raisonnent.

Malheureusement, leurs explications ne suffisent pas à comprendre comment la carte des zones épidermique fût conçue.

Quand on écoute Grosjean en parler, cela reste extrêmement flou et hypothétique.

Dans tous les cas, la base principale reste la loi de la récapitulation, dans sa forme la plus fausse possible (voir son énonciation dans ce document de Grosjean, page 134), qui est invalide.

Mémoire corporelle

Cette idée très séduisante, que l’on retrouve dans d’autres théories comme celles à base de « fascias », n’a malheureusement jamais été étayée.

Cette hypothèse est fascinante à plus d’un titre, ce qui rend d’autant plus frustrant le fait que la microkinésithérapie n’essai même pas de la vérifier (en produisant des expériences) ni même de l’expliquer (en réfléchissant à un fonctionnement théorique).

La carte du corps des zones de lecture de mémoire par type d’agression, est, d’après Grosjean lui même, « totalement impossible à expliquer« .

Cela n’empêche en rien la microkinésithérapie d’utiliser la mémoire des tissus comme un point clé de sa pratique. Les microkinésithérapeutes prétendent simplement pouvoir lire cette mémoire. Rappelons nous que, pour passer de kiné à microkiné-lecteur-de-mémoire-holographique-tissulaire, cela prend 10 jours. Comment les croire ? C’est leur parole contre la notre. Mais il est facile pour une personne de prétendre que des anges lui parlent, par exemple, et extrêmement difficile pour une autre de démontrer que c’est faux. Ce déséquilibre leur donne un avantage.

De plus, l’idée semble naturelle, il y a un gros appel à l’intuition, un biais cognitif qui va pouvoir court-circuiter notre jugement critique.

Par exemple, lisez ça :

Alors que vous marchez seul(e) dans une rue, un homme vous agresse soudainement. Au moment où vous êtes en train de vous rendre compte que vous êtes sur le point de vous faire agresser physiquement, vous corps se raidit. Il enregistre en fait le traumatisme. 20 ans plus tard, alors que vous avez oublié l’apparence de cet homme, voire peut être l’incident lui même, vous croisez un autre homme d’apparence très similaire. Votre corps va se raidir subrepticement. Si vous devez interagir avec lui (peut être est-ce un nouveau collègue) vous allez être réticent(e) sans comprendre pourquoi. C’est votre corps qui se rappelle l’agression.

De moi, inspiré par un extrait du livre « L’intelligence autonome du corps »

Instinctivement, on y croit, non ? En tout cas moi j’y ai cru, et étais emballé lors de ma lecture de « l’intelligence autonome du corps », un livre portant énormément sur la mémoire corporelle, je me disais « p’tin ce gars il à tout compris » etc… il a fallu du temps à mon esprit critique pour se réveiller (il est en mode veille bien plus souvent qu’on ne le croit) et me faire aller sur internet pour chercher un peu des sources quant aux fascias et tout ça… retour sur terre.

L’idée en elle même est peut être bonne, mais certaines personnes s’en servent juste pour faire passer, sous le radar de notre esprit critique, le manque de fondement de leur pratique.

Questions

  • Comment est organisée la mémoire ? Est-ce un ensemble d’évènements disponibles comme des fichiers qui attendent d’être lu ?
  • Une fois le bon tissu repéré, comment accède t’on à la mémoire pour une date donnée ?
  • Cette mémoire peut elle corrompue, illisible ?
  • Cette mémoire peut elle être altérée ?
  • Une fois les mains posées « au bon endroit », des souvenirs surgissent-ils d’eux même, ou doit-il y avoir une demande, voire une sélection de la part du praticien ?
  • Une fois les mains posées « au bon endroit », il y a plusieurs tissus, chacun rempli de mémoire, comment sélectionner un tissu en particulier ? Comment ensuite sélectionner une mémoire ?
  • Si on ne peut pas « sélectionner », comment interroge t’on la mémoire ?
  • Pourquoi ne jamais avoir fait d’observation par EEG ou IRM du cerveau d’un microkinésithérapeute lorsqu’il lit la mémoire d’un tissu, pour voir un peu qu’est-ce qu’il se passe ? Cela semble pourtant une chose très facile à mettre en œuvre.
  • Comment le praticien ressent-il la lecture de cette mémoire ? Est-ce comme lorsqu’on accède à un de nos propres souvenirs ? Ou alors est-ce une expérience complètement différente, de sorte qu’aucune confusion n’est possible entre un souvenir de notre propre mémoire, et le souvenir de la mémoire d’un tissu d’une tierce personne ?
  • Est-il possible de lire la mémoire de nos propres tissus ? Le ressenti est-il diffèrent de quand on palpe une tierce personne ?
  • Est-il possible pour un praticien d’endommager la mémoire ? Comment être sûr que ce n’est que de la « lecture seule » ?
  • Lorsque Grosjean, après avoir posé les main pendant une demi seconde sur un patient déclare soudainement « Durant le 5ème mois de vie fœtale, sa maman a vécu quelque chose de difficile », pourquoi la date est-elle précise au mois près, mais aucune précision n’est possible au delà de « quelque chose de difficile » ? Pourquoi une précision au mois près sur la date est possible dans ce cas là, et 1 minutes plus tard il fait un balayage à deux ans près pour la date d’un autre traumatisme, sur la même personne, et fini même par devoir demander son âge ? Pourquoi même parler de ça, alors qu’aucun lien n’est fait entre ça et les maux de tête de la patiente ? J’expose une réponse possible ici.
  • Si je me prends une flèche empoisonnée, je vais recevoir à la fois un choc traumatique, une agression toxique, infectieux ensuite et plus ou moins obstructif suivant l’emplacement de la flèche dans mon corps. Où la mémoire de ce traumatisme va-t-elle être stockée ? Partout ? Peut-on encore trouver l’emplacement exact de l’étiologie dans ce cas ? Est-ce que chaque zone de lecture va avoir exactement la même info ?
  • Comment sont jugés les étudiants en microkiné, sur leur capacité à lire correctement la mémoire des tissus ? Cela fait-il partie de l’examen de fin de formation ?
  • Pourquoi ne jamais avoir fait de tests simplement pour vérifier que plusieurs microkinésithérapeutes rapportent bien la même information (venant d’une lecture de la mémoire) à partir d’un même patient ?

Bref, beaucoup de questions, aucune réponse, et aucune explication.

Ré-information et auto guérison

L’acte salvateur de la ré-information n’est jamais expliqué clairement. Il s’agit pourtant du phénomène qui permet à la microkinésithérapie d’avoir un effet bénéfique sur le patient. La « communication » censée avoir lieu entre le thérapeute et le patient à ce moment là, n’est pas non plus théorisée (ni dans sa nature, ni dans son fonctionnement). Il s’agit d’une prétention quasiment invérifiable, pour laquelle aucune preuve de véracité n’a été apporté à ce jour.

Questions

  • En homéopathie, il y a un certain pourcentage de dilution d’une substance pour pour qu’elle soit considérée comme « en quantité infinitésimale » et produire l’effet inverse qu’elle devrait produire (principe de similitude… en microkinésithérapie, qu’est-ce qui est considéré comme « beaucoup moins intense » lorsqu’on réinforme le corps du traumatisme ? Il y a t’il des fois où c’est trop intense et ça ne fonctionne pas ? ou au contraire ?
  • Cette ré-information est-elle physique (comme un léger étirement d’un muscle, comme j’ai pu le voir sur certaines vidéos) ? Mais à l’évidence, un accès physique n’est pas toujours possible, comment cela se passe -t-il alors ? Par la pensée ?
  • Comment évaluer, ou même juste savoir, si un élève en microkinésithérapie maitrise la ré-information et sera en mesure de traiter ses patients convenablement ?

On sent une inspiration de l’homéopathie dans cette idée, qui, en l’absence totale d’explication ou de preuve pour la supporter, reste dénuée de toute crédibilité.

Micropalpation

Il en va de même pour les micropalpations. Le geste phare (en fait : le seul geste), la signature, de la microkinésithérapie.

On note que, parfois il semblerait que les mains soient en fait un récepteur d’onde vitale, d’où le fait de pouvoir garder les vêtements pendant la séance, et parfois il semblerait que le toucher du derme soit si capital, que la partie de la main utilisée pour palper est différente suivant le cas (paumes, ou bouts des doigts).

Leur fonctionnement a un début de tentative d’explication, avec des pulsations et de la mémoire stockée dans les tissues, qu’il serait possible de « lire » ou de « ressentir », mais aucune preuve n’est apportée, et aucune explication sur la nature de ces choses n’est avancée, au delà de Grosjean qui prétend sentir la Vie.

Par exemple, comment la mémoire stockée (sous quelle forme?) dans les tissus peut-elle traverser la chair, les vêtements et l’air pour arriver dans les mains du praticiens, puis de là, comment cette information est elle reçu par le corps, comment est elle transmise, par quels canaux, quel système sensoriel, jusqu’à leur interprétation par le cerveau, qui va être capable de décrypter, après une micropalpation d’une seconde, que « durant la 3ème semaine de votre vie de fœtus, votre maman a eu un important choc émotionnel » ? « Ta gueule, c’est quantique » ?

Alors que certaines théories des fascias n’hésitent pas à avancer la physique quantique comme « explication » de leur fonctionnement, Grosjean & Benini, eux, sont restés « new-age old-school », avec simplement le bon vieux principe de Vitalité/Souffle Vital/Rythmes Vitaux présent en naturopathie, homéopathie etc… Cela peut plaire aux adhérents au concepts spirituels tels que les chakra ou l’énergie vitale, mais malheureusement, cela n’explique rien.

Correction homéo causale

J’ai eu un peu du mal à comprendre pourquoi tant insister sur ce point, comme si il était unique à la microkinésithérapie. Grosjean n’hésite pas à déclarer que « contrairement à l’allopathie » , ou même que « contrairement à l’ostéopathie », la microkinésithérapie va agir sur la cause, et non pas les symptômes.

Mais il faut bien avoir conscience que nombre de thérapies, incluant l’ostéopathie, d’ailleurs, prétendent déjà la même chose.

Prétendre guérir un mal en agissant sur sa cause n’a rien d’unique, ni de révolutionnaire, ni même de spécial.

De plus, soulager des symptômes et également très louable, surtout que certains peuvent vous tuer avant même que la cause ne le fasse (poussée de fièvre etc…).

En médecine par exemple, on va pouvoir soulager un mal de tête avec du Doliprane, donc là on agit juste sur le symptôme, oui, et puis le corps se charge de la cause (par exemple réhydrater le cerveau si c’était juste une gueule de bois)… mais si vous êtes victime d’une infection bactériologique que votre corps ne peut plus gérer, et qu’on vous donne l’antibiotique qui va bien, c’est bien sur la cause (les bactéries pathogènes) qu’on agit.

La plupart d’entre nous, lorsque nous allons chez le docteurs, c’est pour un rhume ou un autre infection par un virus, que la médecine ne sait pas soigner (c’est à dire directement tuer le virus). Seul le corps peut éradiquer le virus, et en attendant le médecin prescrit donc des choses « seulement » pour atténuer les symptômes (ce qui, encore une fois aide, voire sauve). Sinon, une des compétences principales d’un médecin, ce pourquoi il a étudié si longtemps, c’est bien de faire un diagnostic, c’est à dire identifier la cause d’une maladie/défaillance, afin de soigner en agissant dessus.

Grosjean utilise parfois l’expression « cause profonde ». Que cela signifie t’il ? Serait-ce la cause de la cause ? Ou mieux : la cause de la cause de la cause ? En effet, si on y réfléchit, toute cause a une cause, et cela ne s’arrête jamais (à moins de postuler de façon arbitraire de l’existence d’une origine absolue). Mon mal de dos est causé par l’hyper tension d’un muscle causée par la surexcitation d’un nerf, causé par un gros stress causé par une dispute avec ma belle mère causée par la mort de son chat causé par une voiture conduite par le voisin qui allait voir un acuponcteur pour son mal de dos causé par etc… donc là on pourrait inventer la nanokiné, qui irait corriger la cause supra-profonde du mal de dos, c’est à dire les réflexes en voiture du voisin, et dire que les autres thérapies ne valent rien, car la prochaine fois que le voisin tuera le nouveau chat de votre belle mère en voiture, cela vous causera à nouveau mal au dos. Ou pas. Blagues à part, ce que je voulais surtout dire, c’est que la notion même de « cause », est en fait très épineuse.

Bref, un peu comme le slogan « soigner le malade, pas la maladie » de l’homéopathie, c’est surtout marketing, pour appâter les personnes qui ont une dent contre une certaine pratique de la médecine qui manque d’humanisme. Cela n’apporte pas de valeur ajoutée à la construction d’une théorie sérieuse.

Résumé

Bases

  • Embryogenèse : base scientifique qui n’est quasiment pas utilisée en pratique, sauf pour aider à la conception d’une des cartes du corps (zones épidermiques).
  • Phylogenèse : base scientifique qui n’est quasiment pas utilisée en pratique.
  • Loi de la récapitulation : théorie obsolète, maintenant invalide en science.
  • Ostéopathie cranio-sacrée : relève du charlatanisme.
  • Homéopathie, en particulier le principe de similitude : relève du charlatanisme.

Spécifiques microkinésithérapie

  • Rythmes vitaux des tissus : Idée non vérifiée dont l’utilité pour la pratique reste floue.
  • Etages corporels : je manque de sources sur ce point.
  • Zones épidermiques : la seule tentative de théorisation basée sur des connaissances scientifiques, malheureusement pour certaines dépassées. Trop flou.
  • Mémoire corporelle de l’agression : pas d’explication.
  • Ré-information et auto guérison : pas d’explication.
  • Micropalpation : pas d’explication.
  • Correction homéo causale : relève du slogan marketing.

Conclusion

Les bases scientifiques, bien que largement mises en avant, se révèlent en fait quasiment inutilisées pour expliquer les fondamentaux de la microkinésithérapie. De plus une partie d’entre elles n’est tout simplement plus valide de nos jour.

La micropalpation et la sollicitation/ré-information sont les seuls gestes de la microkinésithérapie, et sont de prétention thérapeutique ahurissante « peut être utilisée après toute forme d’agressions, traumatiques, toxiques, infectieuses, psychologiques, etc. » chez les hommes, animaux, voire les plantes (on est quasiment au niveau de concurrencer Jésus). Le tout servi sans explication.

Au final, la théorie ne tient pas debout, et, après analyse, apparait comme un écran de fumée plus qu’autre chose. On se retrouve donc avec une méthode entièrement basée des idées, de l’intuition, et sur le ressenti des 2 personnes ayant créé la microkinésithérapie, ce qui, au vu des prétentions de la méthode, n’est décemment pas acceptable.

Sources

Nombre de sources sont données en lien directement dans les paragraphes qu’elles concernent.

Comme il s’agissait ici d’un exercice d’analyse, de mise à l’épreuve, le déploiement de tout son esprit critique est de rigueur. Il est important de développer ce dernier, un peu comme un muscle. Personnellement, j’ai trouvé très utile :

Plus globalement les sources que j’utilise sont également listées dans ce post dédié.

Prochaine étape : la pratique de la microkinésithérapie

Même si une thérapie n’a pas de fondement et demeure totalement inexpliquée, il reste peut être encore une faible chance que sa pratique soit, dans une certaine mesure, tout de même efficace.

C’est ce que nous allons voir, pour la microkinésithérapie.

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